Depuis plusieurs années se multiplient les capteurs de pollution de l’air, accessibles pour quelques centaines d’euros. On espère ainsi que les citoyens puissent rendre visible les préjudices environnementaux ou sanitaires qu’ils subissent.
Pourtant, ces « capteurs citoyens » sont produits dans des conditions opaques, et répondent à un cahier des charges qui est éloigné des exigences métrologiques des institutions de surveillance.
En collaboration avec François Dedieu, nous avons voulu savoir à quelles conditions les autorités reconnaissent et intègrent les capteurs numériques dans les mesures officielles. En menant l’enquête auprès de trois associations californiennes en lutte pour la qualité de l’air, nous montrons que leurs mesures sont prises au sérieux par les autorités à deux conditions : (1) que les instances scientifiques et réglementaires en viennent à considérer les capteurs citoyens comme des dispositifs de connaissance et de gouvernement ; (2) que militants, chercheurs et responsables publics s’engagent dans la mise en place d’un protocole, c’est-à-dire d’un ensemble de règles touchant à l’infrastructure matérielle, destiné à produire des mesures suffisamment « précises » et à réduire les tensions entre les savoirs citoyens et les savoirs scientifiques et règlementaires.